lesspectacles
avignon2010

Théâtre En Mots critiques de théâtre et des arts de la scène

 
Théâtre
Bureau national des allogènes
de Stanislas Cotton
La Strada

 

Mise en scène : Catherine Toussaint
 
Avec : François Cancelli, Joël Lokossou, Denis Jarosinski,

Scénographie :
William Noblet
Musique :
Denis Jarosinski
Lumières :
Daniel Linard
Costumes :
Hanna Sjödin
 
                                                        

du jeudi 8 au mardi 27 juillet 2010
(Relâche lundi 12,  lundi 19 juillet)
 
à 17h
 
  Caserne des Pompiers
116 rue Carreterie
Réservation : 04 90 39 46 37
 
 Durée du spectacle : 1h10 
 
 


Rigobert Rigodon, fonctionnaire au Bureau National des Allogènes, a la conscience sur les chevilles. Tenu de respecter les quotas, notre homme reçoit à longueur d’année les demandeurs d'asile que le vent lui porte avec son lot de misères. La plupart du temps, il retourne à l’envoyeur. Mais à force, il finit par être tiraillé entre devoir et compassion. Tout a commencé le jour où Barthélemy Bongo, homme dépossédé de tout est venu lui demander si en tant qu'être humain, il pouvait rester ici.

 

 

 

C'est d'abord un grand texte, publié en 2002, qui apparaît tout aussi actuel dans notre gouvernement, parfaitement joué par ces trois comédiens, deux acteurs et un musicien. Cette pièce de Stanislas Cotton ramène à sa condition perfectible l'homme qui doit veiller à conserver sa conscience morale quelque soit ce qu'il vit ou ce que son environnement lui dicte. Est effleuré cet aspect de l'humanité qui fait qu'un accusé finit par croire qu'il est coupable de ce dont on l'accuse. Monsieur Rigaudon appelle des numéros et non des personnes, tout à ces clichés de ces petites gens aux petites vies sans gravité, qui ne voient de l'extérieur que le coin de leur rue ou à travers des voyages très organisés, n'écoute jamais vraiment ceux qui sont en face de lui. Car pour le fonctionnaire, ces émigrants ne comptent pas, ils ont de toute façon tort -d'être là, sont forcément menteurs, et puis surtout ce préposé à la loi n'est pas concerné par ces autres vies. Si ce n'est en cannibale lorsqu'il est attirée par le physique d'une fille. Un enfant qui à faim l'émeut vaguement. Vaguement écoeuré se rendant compte de son attitude,  apercevant ce qu'il ne voulait pas voir en lui, il finira par sauter du 6ème étage, à défaut de changer, faire changer, décider d'agir autrement. Monsieur Rigaudon raconte sous la forme de prose du récit, ces entretiens dans son bureau de fonctionnaire destinés surtout à rejeter les demandes d'asiles. Vivant  physiquement ces moments, il se contorsionne, s'agite, entame avec le guitariste chanteur qui dans l'ombre colore le récit de solos de guitare (sèche, amplifiée -petites notes aux sonorités profondes-, de beaux duos musicaux, de type jazz-nouvelle chanson française. L'histoire s'attarde dans sa rencontre avec un des demandeurs d'asile, Barthélemy Bongo. Celui-ci dans la dernière partie de la pièce vient nous raconter la même histoire, telle qu'il l'a vécue lui même. Au contraire du fonctionnaire tyrannique et dérangé, l'homme africain est calme, grand, plein de mansuétude, de tentatives de compréhension pour son prochain, y compris devant cet homme qu'il aurait bien voulu connaître et comprendre. Sa reconnaissance de la condition humaine y compris la sienne, lorsque l'humain devient sauvage, est douloureuse dans son passé et un présent semés d'épreuves.

Une originale mise en scène évoque une sorte de cabaret, la scène est une étroite table très longue, nous sommes autour, spectateur de cet ordinaire quotidien actuel. L'homme est petit, ordinaire, classique fonctionnaire, homme d'affaire. Il a une chaise, un fauteuil plutôt, de dentiste à moins que ce ne soit une chaise électrique. Lorsqu'il s'énerve, crie, inhumain et fou, sur de son impunité, représentant la loi qu'il diffuse, le fauteuil tel un ascenseur se distant démesurément, s'élève...

Une pièce à voir !

Avignon, jeudi 15 juillet 2010

 

 

Avec le soutiens de la Région Champagne-Ardenne, de la DRAC, des villes de Revin et Troyes .
 Associée actuellement à "La Salamandre", Scène Conventionnée de Vitry-le-François, la compagnie est aussi en résidence triennale à l'Espace Jean Vilar à Revin dans les Ardennes. Fondée en 1996, par Catherine Toussaint et François Cancelli, La Strada Cie soucieuse de ne pas s'enfermer dans une démarche obsédante propose des formes artistiques extrêmement variées, au gré des artistes et des auteurs qu'elle rencontre.