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- Elle vient d'un pays chaud où
il y a beaucoup de couleurs et de soleil, où on
chante quand on pense et on rêve. Un pays où
il ne pleut pas. Jusqu'au jour où elle à du
en partir parce que des bombes y pleuvaient.
- Maintenant elle tremble quand vient
l'orage ici, elle croit que les bombes vont tomber.
Après des jours et des mois de marche, quand ses
pieds ne l'ont plus portée, elle les à fait
se reposer s'arrêtant sur ce quai de gare. Il faut
bien s'arrêter quelque part. Elle n'attends pas
vraiment de train, juste un endroit où elle se
sente en sécurité. Elle pourrait bien aller
dans un sens comme dans un autre, aussi c'est ce qu'elle
peut répondre si un train arrive.
Dans cette gare il y a un chef de gare avec un
képi. Il téléphone à heures
régulières, ses rapports de bon
fonctionnement de la gare. Quand il traverse les voies il
parle, demande si oui ou non un train arrive.
Non pas de train qui vient... Il est chef de cette gare
depuis des années, mais la ligne principale
à été déviée, c'est
une gare abandonnée... Qu'à cela ne tienne.
De génération en génération
on a été chef de gare dans sa famille !
Lorsqu'il avertit au téléphone que cette
fois, tout ne va pas bien, qu'une personne occupe le quai
d'en face, on lui ordonne de demander ces papiers
à cette personne. Et comme elle n'en a pas, on lui
dit que c'est PERSONNE donc..., qu'on peut pas s'occuper
de son dossier, qu'on passe l'éponge. Puisqu'il
n'y a Personne, tout va bien ("ils ont raccrochés
au téléphone, ça veut dire que
c'est réglé...").
- Alors la vie s'installe pour
Personne, sur le quai d'en face. Et à force
d'être l'un en face de l'autre, forcément
inévitablement, des liens se créent.
Si le chef de gare est gêné dans son repos
nocturne par ses chants, quelque chose dans son coeur
oublié, se réveille. Il la protège
quand il l'a voit endormie trop au bord, un pied et une
main prés des rails. Avec son échelle,
doucement il les ramènent sur le quai, puis bloque
celle-ci sur le bord, comme pour faire les barreaux d'un
lit de bébé.
- Ils devinent puis connaissent
à mesure, les mots de leurs langues
respectives.
- Peu à peu les expressions de
l'un, deviennent celles de l'autre.
Sous forme de plaisanterie, elle lui dit qu'elle
s'appelle Thérèse. Alors comme tout chef de
gare qui se respecte, il doit taper son rapport et il
l'envoie par un fax-pneumatique (on a du changer
d'époque, mais tout est pareil, seul les moyens
changent ).
Un jour le téléphone sonne : puisque
Personne est devenue Thérèse, un train va
venir la chercher, et la ramener d'où elle vient.
Qu'il y aient des bombes d'où elle vienne, ne
change rien pour la Loi.
Mais cette fois le chef de gare se rebelle : il est le
CHEF de CETTE gare et il fera tout pour qu'on ne vienne
pas...
Il y a deux quais, une horloge, une jeune fille
habillée d'ocre, d'orange, de brun, de bleu et de
rouge. Des tissus, une poussette chargée de ses
affaires. Un chef de gare tout en bleu sombre, un
képi blanc. Un vieux téléphone sur
un pylône qu'on atteint avec une échelle.
Voilà l'histoire qu'Amita, la petite fille de
Kalkouma, nous raconte. Voilà comment sa
grand-mère et son grand-père se sont
rencontrés.
- vu dimanche 18 juillet
2004
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