Festival 2009
 

Création 2009, Théâtre, vidéo-cinéma
Radio Muezin
Berlin/ Le Caire
de
Stephan Kaegi/ Rimini Protokoll
spectacle en arabe surtitré en français

Mise en scéne : Stéphan Kaegi 

 
Cloître des Carmes  du 22 au 28 juillet 2009,  Me, J, S, D, L, M
 

 

Stephan Kaeghi, rencontre publique, Cloitre St Louis, Festival d'Avignon (In)  2009

 

 

Recréateur de réalités, metteur en scène, Stéphan Kaegi, Suisse de 35 ans, à présenté au Festival d'Avignon 2006 "Cargo Sofia-Avignon", une extraordinaire déambulation qui emmenait les spectateurs en camion (réellement) à la découverte des lieux de transit et de ceux qui côtoient le monde du transport de marchandises (de vrais personnes nous faisant connaître leur travail, et leur vie). Cette année Stéphan Kaegi et son collectif théâtral Rimini Protokoll ramène du Caire un spectacle nourri de témoignages de muezzins.

Stéphan Kaegi invite quatre véritables muezzins du Caire à monter sur scènes pour évoquer l'appel  à la prière et plus largement le temps rythmé de leur existence singulière. Sur fond d'images de la capitale égyptienne ou de photos personnelles, les muezzins se racontent.

 

 

 

On ressort extraordinairement calme, on a envie de rester, et pendant 1 h 20, je n'ai pratiquement pas fait un geste, pris dans ce que je voyais et l'impression de vivre un moment exceptionnel qui ne se reproduirait pas. Tout est extraordinaire. Le point central, comme un résumé de ce qui est montré, est sans doute le passage où un muezzin nous explique qu'il s'occupe d'une mosquée très petite (dont il comparera la taille à une petite partie de l'espace scénique où se trouve des tapis de prière -un rectangle par personne-) et qu'il y passe aussi l'aspirateur -équipe réduite oblige-. Il amène un aspirateur tandis que les images de quatre écrans vidéos égrènent des images, des sons extraordinairement visuels, pris au Caire, et qui composent sa vie (il est le 4éme Muezzin, sur le 4éme écran). Le bruit de l'aspirateur est léger sur cette scène assez immense et solennelle et sur les autres sons, petite matérialité mût par l'être humain. Il le passe très lentement sur les tapis, suivant un cercle imaginaire, tandis que quatre ventilateurs au dessus se mettent lentement en marchent, ajoutant leur bruit, léger et imposant. S'élève ensuite, si je me souviens bien, un autre son, profond et sourd, une composition musicale particulière. Sur les écrans, défilent des images de la ville, des bus du Caire, des maisons détruites, l’image bouge comme prise d’une voiture, signe encore matérielle et sensible de l'être humain, à l'aide d'une caméra qui avance latéralement.
Il ressort de cet ensemble un sentiment fort, tandis que le muezzin sur son halo, havre de paix, tourne lentement autour du rond imaginaire et restreint de sa petite mosquée où 50 personnes peuvent prier, dont il a la charge, pour sa plus grande fierté. Dans cette ville, dure où tous sont pauvre, où l’état religieux seul s’occupe des autres (non comme ici l’état tout court), la reconnaissance que tous les muezzins ont par rapport à la mosquée s’explique. Elle est leur sauveur, sans elle rien n'est prévu, point de salut. Cette précarité, ce salut fragile, le sentiment de plénitude qui habite ces devenus privilégiés, se ressent particulièrement dans ce moment de la pièce. Pièce n’est pas le mot exact d’ailleurs puisqu’il s’agit de vie réelle mise en forme seulement, non jouée par des comédiens mais par les personnes réelles dont il s'agit, qui se présentent à nous. C’est exceptionnel car on sait qu’on n’aura pas l’occasion de revoir ces vrais muezzins. Mais bien sur ce qui est remarquable, de l'ordre du théâtre, c'est cette capacité poétique à évoquer, à comprendre, à l'aide d'images, de sons formant émotions et sensations, tout un contexte autour de ce dont on parle.
Ces muezzins sont à la fois réel, aussi vrais que nature, et caractéristiques. L’ensemble parait tenir sur le fil du miracle, extraordinaire, esthétique, un travail de plasticien, de vidéaste, de journaliste, sensible sur tout les sens du mot, d'une apparente simplicité qui fait ressentir et comprendre ce qui n'est aucunement dit.
 
Une sorte de clin d'oeil, de pied de nez à ce qu'on peut imaginer par les médias des Islamistes, par le grand calme et l'état d'apaisement que provoque cette approche de l'univers de ces hommes au service d'Allah.
Le propos n'est pas de prendre position, il montre une part réelle de la vie des musulmans. Stéphan Kaeghi sans doute n'oublie pas, dans sa neutralité, ce qui est une réalité de cette religion. Aucune femme n'est représentée ni citée au cours de la représentation, même lorsque les muezzins se présentent, disent qu'ils ont un ou plusieurs enfants, sont mariés. Un des muezzin dira à la fin : "on m'a demandé ici pendant le festival d'Avignon pourquoi on ne voyait pas de femmes, je répondrais simplement  que c'est parce qu'Allah ne le veut pas. je ne fais qu'exécuter les ordres de Dieu (Allah)". Une intransigeance tranquille et déterminée qui, sans appuyer, évoque cette autre partie de la religion.
Stephan Kaegi, lors d'une rencontre publique, à expliqué que le propos n'etait pas de savoir ce qui arrivera dans quelques décennies, lorsqu'en Europe la religion musulmane sera majoritaire en nombre de manière inéluctable vue les migrations des individus. La pièce pourrait en être comme une préparation sereine, teinté d'humour, dans le but d'une coexistence pacifique et, on peut l'imaginer d'une modernisation comme pour l'appel à la prière, de la religion. C'est en tout les cas une représentation sensorielle et sonore de vies différentes, qu'on à le privilège de découvrir comme si on les côtoyaient.
Une dose d'humour scénique se concrétise lorsque le muezzin ancien champion d'haltérophilie (à la voix d'une douceur envoûtante un peu effrayante par contraste avec sa carrure, choisie pour sa voix comme muezzin public dans la nouvelle organisation de l'appel à la prière centralisé), ouvrant un paravent sur scène qui représente la façon dont les femmes peuvent assister à la prière dans une mosquée, laisse apparaître, pour l'instant... son matériel d'haltérophile. Drôle aussi, le cornichon explosif que prépare un des muezzin ancien électricien devant nous, pour nous expliquer le nouveau principe de radiodiffusion de l'appel à la prière décidée par l'état religieux du pays. Puis la manipulation par le technicien du son (et scénographe ?) d'une antenne de radio pour illustrer la manière utilisée pour émettre et diffuser via des ondes radio la voix d'un homme, ce qui donne un son difficilement audible comme il veut nous le démontrer.
 
 
Il est indiqué par sous titres que les muezzins ne peuvent se permettre d'être salué plusieurs fois. Il était interdit de prendre des photos du spectacle, ce que le caractère religieux de la soirée engage à respecter.
 
 
lundi 27 juillet 2009
 

 

 

 

Avec : Abdelmoty Abdelsamia Ali Hindawy,
Hussein Gouda Hussein Bdawy,
Mansour Abdelsalam Mansour Namous,

Mohamed Ali Mahmoud Farag,

Sayed Abdellatif Mohamed Hammad
 
 
Conception et Mise en scéne : Stephan Kaegi
Assistanat à la mise en scéne : Dia'Deen Helmy Hamed
 
Composition et création sonore : Mahmoud Refat
Création vidéo : Bruno Deville, Shady George Fakhry (au Caire)
Dramaturgie : Laila Soliman
Scénographie : Mohamed Shoukry
 
Lumière et direction technique : Sven Nichterlein, Saad Samir Hassan (au Caire)
Opérateur vidéo : Bodo Gottschalk
Traduction et surtitrage : Ghada El-Sherbiny, Ebtihal Shedid, Bassant Hassan (au caire)
Direction de la production : Juliane Männel, Lana Mustaqh (au Caire)
Accompagnement de la compagnie : Samah Samir, Ramy Tawfeeq
Du 22 au 28 juillet 2009
relâche le 24
22H. Clôitre des Carmes  :  Place des Carmes
Durée : 1H15

 

 

 

 

 

 

 

A B C D E F G H I J K L M N O P Q R S T